Un grand drame en cinq actes et en alexandrins, inédit et d’actualité !
ACTE I
(Autour du feu qui crépite dans la grande cheminée : François, Pénélope, et Paddy, leur fidèle setter irlandais)
François
Quarante ans ! Quarante ans de scrutins, de préaux,
De militants bornés, d’élections, de tréteaux !
J’ai coupé des rubans, tâté le cul des bêtes.
Combien de vins d’honneur ? De maisons de retraite ?
Et on dénie le mien ? Et on voudrait la mienne ?
Ces quatre décennies, il faut qu’on s’en souvienne !
Et Le Theule, et Séguin, je les ai enterrés !
J’ai fait tout le cursus, sénateur, député, …
J’ai sauté sur Paris pour contourner Le Foll,
J’ai laminé Dati, la diva, cette folle !
J’ai attaqué Jouyet et combattu Copé,
J’ai dézingué Sarko, éliminé Juppé,
NKM et Poisson et le pompeux Le Maire !
J’ai rallié les cathos, j’ai gagné les primaires !
C’est mon tour, sans pathos, enfin c’était mon heure !
C’était la revanche du « collaborateur » !
Voilà dix jours déjà le fâcheux Palmipède…
(Ce souvenir me glace.)
Pénélope
Il voudrait te voir dead !
François
… Me décocha hélas cette flèche du Parthe !
Elle atterrit ici, à Beaucé, dans la Sarthe !
C’est un odieux complot du pouvoir socialo !
Une conspiration des journaleux gauchos !
Pénélope
My dear, je suis sorry ; de mon envie de taf,
Pourquoi ai-je parlé au Sunday Telegraph !?
Pour la revue de Marc, j’ai écrit deux notules,
J’en suis, so exhausted !, restée sur les rotules !
François
C’est moi le responsable, Penny, j’en ai peur.
J’en parlerai demain à notre confesseur.
Si le parti me suit, …
Pénélope
Tu atteindras ton goal !
François
Sinon tant pis pour eux, le Crédit agricole
(Son agence à Sablé), encaissera le fruit
De mes conférences, ici, là, en Russie, …
Semaine décisive ! Ou ils osent ou ils cannent !
Ils se détestent trop pour dire : Yes, we can !
Ils n’oseront jamais, je les connais trop bien !
Voici nos avocats, faisons silence, on vient !
Entrent Charles et Marie, pull sur les épaules,
Charles, très « famille le quesnoy »
Daddy, Mummy, venez, allons faire un croquet !
Marie, tapant dans ses mains
Ca change les idées, c’est bon pour la santé !
ACTE II
(Dans le bureau du président du Sénat, l’état-major du candidat, en pleine effervescence)
Retailleau
Parlons clair entre nous : l’affaire Pénélope
Plombe la campagne, nous conduit droit au flop !
Il nous faut une flèche et non un pis-aller !
Aussi pour le Plan B, je ne vois que Larcher !
C’est à toi mon Gérard, avec ta bonhomie,
D’aller dire à Fillon d’en prendre son parti.
Ta rondeur épanouie, ton faux air de Noiret,
Sauront le convaincre qu’un retrait ordonné
Vaut mieux qu’une défaite aujourd’hui assurée !
Larcher
Et puis dans la foulée je pourrais annoncer
Que, poussé par les miens, j’accepte de gagner
Un rang en passant là du deuxième au premier.
Péné retrouvera son Ulysse à Ithaque,
Il en sera pour nous fini de ce pataq…
Ès… est-ce que vraiment, on veut finir ainsi ?
Stefanini
De Juppé à Fillon, une fois j’ai trahi ;
La trahison inverse annulerait le tout,
Je rentre à la niche, je suis un bon toutou.
Pour moi c’est à Juppé qu’il faut se rallier,
Encore nous faudra-t-il aller le supplier !
Le bougre est orgueilleux, à ses conditions
Il faudra se plier, s’il supplante Fillon.
Le nôtre de fion il faudra le huiler :
Ça le fera bander de nous montrer qu’il est
Le meilleur d’entre nous, à défaut du plus jeune.
Larcher
J’entends ce que tu dis, mais remisons nos guns.
La décision ne peut être prise dans l’heure.
Attendons donc un peu ; un train de sénateur
Nous permettra de voir ce qu’il convient de faire
Pour éviter de choir dans un oubli amer !
ACTE III
(A la mairie de Bordeaux)
Juppé
Pop pom pom pom pom pom…
Calmels
Vous avez l’air jouasse !
Juppé
Il me semble sortir d’un corridor de poisse.
A nous deux l’Elysée, et adieu la dèche !
J’ai la pêche, la méga-pêche et l’hyper-pêche !
Venise est loin d’ici et ne me tente plus.
Mais Paris vaut-il que je me casse le cul ?
ACTE IV
(Chez les Sarkozy)
Sarkozy
Je vous ai réunis, ici, à quelques-uns,
Car nous voici cernés par des hordes de Huns.
C’est la France aujourd’hui, et non notre seul camp,
Qui risque gros, qui risque tout, qui risque grand !
Nous saurons prendre nos responsabilités.
Votre soutien m’a-t-il déjà, jamais, manqué ?
Mon expérience est grande, et mon envie aussi,
Oh, pas pour moi, tu sais, mais pour notre pays !
De ma tranquillité faire le sacrifice.
Du naufrage actuel, je n’serai pas complice*.
Carla
Oh mon chouchou d’amour, comme tu parles bien.
Hortefeux
Nicolas, c’est trop bon, dans mon calbut, je viens !
Sarko
Mes amis, je savais pouvoir compter sur vous !
Carla
Comme tu as raison, tu es mon gros loulou !
Hortefeux
Ça y est encore, j’ai une trique en bois !
Wauquiez
Oui bien sûr mais…
Baroin
Tout à fait, cependant…
Sarko
Eh, quoi ?
Baroin
Tu sais, face à Macron, le renouveau est bon !
Wauquiez
Justement je suis jeune, et c’est moi le patron
D’une grande région, pourquoi pas de la France ?
Baroin
Ta ligne politique est à droite, elle est rance !
Je suis consensuel, et donc le mieux placé !
Sarko
Bon, ben c’est pas gagné, la séance est levée !
ACTE V
(A l’Elysée)
Hollande
Hélas, mon bon Jouyet, qu’ai-je dit, qu’ai-je fait ?
A qui vais-je laisser mon si bel Elysée ?
Ai-je eu tort de caler ? De quoi donc ai-je eu peur ?
Fallait-il y aller ? Est-il trop tard d’ailleurs ?
Ne puis-je revenir ? Moi Président, again..
Ils n’ont pas, mes cheveux, besoin que je les teigne !
Vois donc ces candidats, ce sont des nains, des teignes !
L’heure est-elle venue que mon pouvoir s’éteigne ?
Ne puis-je commencer la suite de mon règne ?
Je disais : « ça va mieux », alors qu’en fait tout baigne !
A l’idée de partir, je pâlis, mon cœur saigne !
Un seul salut : l’exil !
Jouyet
Mais où donc ?
Hollande
En Sardaigne !
RIDEAU !
* Les bonnes règles de la versification ne tolèrent pas ce type d’élisions, mais c’est Sarkozy qui parle, et il parle mal.